Les mythes et légendes

De Wiki Mâcon Sud Bourgogne
Révision datée du 9 août 2017 à 10:25 par Frédéric (discussion | contributions)
(diff) ← Version précédente | Voir la version actuelle (diff) | Version suivante → (diff)

L’origine des noms

De l’Arar à la Saône

De multiples versions se rattachent aux noms successifs de la Saône. Jules César et les Romains la nommaient de son nom celtique, l’Arar. Selon certains, ce mot signifiait l’eau, et se retrouve dans de multiples noms de rivières : Arroux, Armançon, Ardèche, Ariège, ou dans la rivière suisse Aar. D’autres signalent la légende d’Arar, dont le frère Celtibar aurait été dévoré par les bêtes sauvages du bord de la rivière. désespéré, Arar se donna la mort, et le cours d’eau l’engloutit.

Pour la Saône, une version fait dériver le nom de Sagona, « l’ensanglantée », car sous le règne de Septime Sévère (vers 200 av.JC), la région fut le théâtre de persécutions des chrétiens et l’eau devint rouge de leur sang.

Pour d’autres, issue du mont de la déesse Ména, le Ménabriga, la rivière Sagone doit son nom à la déesse celtique Sagone. A l’époque d’Auguste (1er siècle ap. JC), les habitants de l’oppidum de Cabillonum (Chalon) élevèrent un monument à la déesse Sauconna, comme le montre une stèle de pierre retrouvée en 1912. Selon certains, les agriculteurs, redoutant les enlisements, auraient invoqué Sauconna, déesse des terres mouvantes. Sauconna dériverait d’un mot signifiant sève, mais aussi tout liquide épais, boueux, gorgé d’eau et semi-liquide. Visuels 36 – scan Plug In Stèle à Sauconna, offerte par les habitants de l’oppidum de Cabillonum

Les légendes

La légende du poisson Klupéa

Le poisson Klupéa, parti de la Méditerranée, remontait la Saône jusqu’à Vioménil pour y prélever un caillou qu’il incrustait dans sa tête avant de le ramener jusqu’au delta du Rhône où régnait le paludisme. Les malades qui touchaient sa tête étaient aussitôt guéris. Des monnaies gauloises de l’atelier de Solima (actuel Soulosse, Vosges) portent au revers le profil du poisson Klupéa à grosse tête, à l’œil cyclopéen et charpenté de 3 arêtes dorsales et 3 ventrales.

Le P'teu de Vergisson

Les sorciers :

Généralités :

« Les sorciers, qui, heureusement, commencent à devenir rares dans nos montagnes (1925, NDLR), sont des paresseux, assez intelligents, maraudeurs et braconniers. …De nos jours, les sorciers de ce genre (jeteurs de sorts) ont à peu près disparu, mais leurs recettes merveilleuses passent encore dans nos campagnes pour avoir une réelle influence. … Si le nombre des sorciers va décroissant, celui des médecins de campagne : rebouteux et surtout rebouteuses est toujours très élevé. Leurs multiples recettes ou prières sont très efficaces pour la plupart des maladies. »[1]

Les pactes :

« On rencontre beaucoup de difficultés pour pénétrer les secrets des jeteurs de sort. Ils deviennent muets quand on les interroge sur leur pouvoir occulte. J’ai cependant entendu, dans les dernières années de sa vie, l’Ermite de Botte, raconter en échange de quelques paquets de tabac, comment il avait vu procéder dans sa jeunesse. C’était d’abord la cérémonie du sacre, des plus extraordinaires. Dans un carrefour, sur le coup de minuit, l’aspirant sorcier, muni d’une poule noire, lui arrache quelques plumes et appelle à grands cris le diable. Satan ne manque pas d’apparaître en la personne du sorcier, déguisé d’une manière grotesque. Il passe un contrat signé du sang de l’apprenti, qui doit renoncer chrême et baptême et se vendre à Satan, corps et âme. Pour prix de ce pacte maudit, le nouveau disciple reçoit le pouvoir d’opérer des maléfices, enchantements et charmes. » p. 36, 37, in Revue La Physiophile n°2 (1ère année), article de M. ROCHET, février 1925

Pratiques de sorcellerie :

« Le sorcier a une grande puissance. Il est capable d’ensorceler les gens, leur donne ou leur ôte à son gré de vilaines maladies, et peut aller jusqu’à faire périr ceux qui lui sont désignés comme victimes. Mais tout n’est pas perdu, car s’il peut faire le mal, il sait aussi le réparer. Moyennant quelque argent ou un bon repas, il lève le sort que lui ou d’autres ont jeté. Si l’on veut, il le renvoie à celui qui l’a donné. Le sorcier frappe l’imagination du paysan pour lui donner confiance. Lorsqu’il entre en consultation, il s’affuble d’énormes lunettes, feint de lire à rebours dans un livre quelconque, vieux et usagé, gribouillé de croix et de têtes de mort. Il porte sur son épaule un animal noir : chat, poule, hibou ou corbeau. Il fait des grimaces, des contorsions, jette des morceaux de bois de côté et d’autre, fait brûler du soufre pour aveugler les consultants. Il tient à sa main une baguette de bois flexible : sa vise (du latin vico) dont il fouette l’air en criant d’une voix caverneuse : ‘traverse montagne, vallon, scartapêne, scartapon, scartapé, hé ! vire, vire ma vise !’. On comprend aisément que devant une telle mise en scène, le paysan terrorisé par les manières étranges du sorcier, suffoqué par les vapeurs sulfureuses, ait en cet homme une confiance illimitée.… Un des plus grands maléfices, qui attire toutes sortes de ruines et de malédictions sur une famille, consiste à tracer, près de sa maison, une croix sur le sol. Pour que la réussite soit plus sûre, on dépose sur la croix, des œufs couvés ou des pommes pourries, alternativement. Le sortilège étant découvert, il suffit de prendre un des œufs, d’y percer quelques trous et de le maintenir au fond d’un ruisseau. Tant qu’il restera quelque chose dans la coquille, l’ennemi souffrira de douleurs terribles. On peut faire mourir quelqu’un de langueur en enfouissant un cœur de bœuf. La mort arrivera, quand le cœur aura disparu. »[2]

Sorcellerie à Blanot

D’après « Les superstitions et les croyances populaires en Mâconnais », de E.Violet, ed.librairie Maurice Renaudier, Mâcon, 1939

A Blanot, un œuf reçu d’un sorcier pouvait faire mourir ; une liqueur offerte par lui pouvait empêcher de guérir d’une maladie ou d’une plaie ; des herbages déposés dans les étables faisaient périr le bétail au fur et à mesure que les herbes pourrissaient.
A Mancey en 1870, on allait à Blanot pour y consulter un sorcier sur le sort des soldats disparus sur le champ de bataille.
A Blanot, on prenait garde de se brouiller avec les personnes suspectes de sorcellerie. On y conte aussi que, dans une ferme isolée de cette commune, deux hommes ayant un jour pénétré dans une étable pour y examiner avec le maître du bétail les vaches laitières de celui-ci, la crème ne voulut ensuite pas prendre en beurre. La fermière baratta toute une grande journée sans résultat et finalement la baratte s’écroula et la crème se répandit sur le sol.
On y raconte de même qu’un jeune garçon, qui avait bu de la liqueur offerte par un sorcier, ne put guérir d’une petite piqûre accidentelle, traîna et mourut sans recours.
On y cite enfin un fait, arrivé en 1848, qui confirme que la réputation de sorcellerie n’était pas exempte de risques pour celui qui en jouissait : un de ces prétendus sorciers qui dormait durant l’après-dîner sur le blé étendu sur l’aire pour y être battu au fléau eut un œil traitreusement crevé d’un coup d’épingle par un voisin qui l’accusait de lui avoir fait périr une vache. Réveillé par la douleur, il s’écria : - Oh ! mon Dieu ! … et l’autre de dire : - Tu sais ce que tu m’as fait, c’est ta punition. Et l’affaire en resta là.

La levée des sorts
A Blanot, on allait consulter le « devin » : c’était, soit « le Grand Bénasse » à Cluny, soit à Blanot même où une désensorceleuse recevait une clientèle venue parfois de loin.
A Blanot… le « devin » montrait le sorcier dans un seau d’eau.

Livres de sorciers (Grand et Petit Albert) On affirme à ce sujet à Blanot, encore de nos jours (1939), qu’un jeune garçon de Cortambert ayant un jour reçu d’un inconnu le Petit Albert ouvrit le livre et y lut : - tourne la page et tu me verras … Ayant tourné cette page, il se sentit aussitôt possédé par une forme mystérieuse et implacable qui l’empêchait de dire sa prière et même de faire le signe de la croix. Et il ne redevint normal que le jour où il put se débarrasser du Petit Albert en le donnant à un autre inconnu. Un témoin du fait existe encore à Blanot, nous dit notre correspondant.

Sabbat A Blanot, le sabbat passait pour se tenir à minuit le samedi, sous la présidence de Satan en feu, dans un bois ; un seul signe de croix suffisait pour faire dissiper instantanément le sabbat.

La Conjuration :

La conjuratrice : c’est une femme en général. « Dans le Charolais, ils font conjurer pour un tas de choses ; ils appellent çà la conjuration… les gamins pour qu’ils ne fassent pas des convulsions. » Mme BACOT - « A Matour, je n’ai pas entendu dire qu’il y en avait. » François NESME - « A Mazille, il y avait cette dame, Mme Barault. Je l’ai connue. Elle guérissait ( ) les moutons de la pelure. Elle guérissait les brûlures et les eczémas aussi. Actuellement, il y a beaucoup de gens qui ont recours au magnétiseur, et qui semblent avoir des résultats. » Mme BACOT

p. 3, in transcription K7 n°4, Mme BACOT, François NESME, et dame non identifiée

Pour les maladies des animaux : Recette magique pour lutter contre la Bruxellose, ou maladie de l’avortement (des vaches) : ‘si t’as l’avortement, t’encrotes (tu enterres dans un crot, un trou) le dernier veau mort devant la porte de l’écurie (de vaches, c’est-à-dire l’étable)’.[3]
  1. p. 36 à 38, in « La Physiophyle » n°2, article « Aux sources de la Grosne et du Sornin », de M.ROCHET, 10 février 1925
  2. p. 37, 38, in Revue La Physiophile n°2 (1ère année), article de M. ROCHET, février 1925
  3. Note G.Thélier, entretien avec Eugène VOUILLON du 10.07.2003